Plan de rattrapage en matière d’égalité salariale femmes – hommes : 3 ans pour se mettre en conformité sous peine d’une pénalité financière (L 1142-10, al. 1 nouveau du Code du travail)

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La loi du 1er août 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel fait obligation aux employeurs d’au moins 50 salariés, de mesurer les écarts de salaire, de publier chaque année des indicateurs relatifs aux dits écarts et d’indiquer les mesures prises pour y remédier.

L’employeur devra alors, selon les écarts, adopter un plan de rattrapage salarial à présenter devant la Direccte. A défaut de correction sous 3 ans,  les employeurs s’exposeront à une pénalité financière susceptible d’atteindre 1 % de la masse salariale .

Art. L. 1142-8. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, l’employeur publie chaque année des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer, selon des modalités et une méthodologie définies par décret.

« Art. L. 1142-9. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque les résultats obtenus par l’entreprise au regard des indicateurs mentionnés à l’article L. 1142-8 se situent en-deçà d’un niveau défini par décret, la négociation sur l’égalité professionnelle prévue au 2° de l’article L. 2242-1 porte également sur les mesures adéquates et pertinentes de correction et, le cas échéant, sur la programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial. En l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci sont déterminées par décision de l’employeur, après consultation du comité social et économique. La décision est déposée auprès de l’autorité administrative dans les mêmes conditions que le plan d’action mentionné à l’article L. 2242-3. L’autorité administrative peut présenter des observations sur les mesures prévues par l’accord ou la décision de l’employeur.

Bref, notons que les textes évoquent les notions d’ « écarts de rémunération » et de « rattrapage salarial » sans plus de précisions : gageons qu’il faut comprendre que la correction se fera à la hausse pour les femmes méritantes et non à la baisse pour les salaires des hommes peu performants. Quoique.

Projet de loi relatif à la lutte contre la fraude : le Verrou de Bercy déverrouillé…

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La commission des finances de l’Assemblée nationale a examiné les 24 et 25 juillet dernier, le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude : les procédures des droits fiscaux et douaniers vont être profondément modifiées dans les temps à venir.

Les sites de l’Assemblée nationale (http://www.assemblee-nationale.fr/15/cr-cfiab/17-18/c1718128.asp) et de l’économie (www.economie.gouv.fr/loi-lutte-contre-fraude) nous résument le projet à venir:

  • ž« La création d’une « police fiscale » au sein du ministère chargé du Budget, en complémentarité des moyens du ministère de l’Intérieur, pour accroître les capacités d’enquête judiciaire en cas de fraude fiscale ;
  • le renforcement des pouvoirs de la douane en matière de lutte contre les logiciels frauduleux. Il s’agit de logiciels dits « permissifs », conçus pour permettre et dissimuler la fraude ;
  • žle renforcement des échanges d’informations utiles à l’accomplissement des missions de contrôle et de recouvrement entre agents chargés de la lutte contre la fraude ;
  • žla précision des obligations fiscales des plateformes d’économies collaboratives pour permettre une meilleure exploitation des données collectées par l’administration et améliorer ses capacités de détection des revenus non déclarés.
  • La mise en œuvre d’une logique de publicité plus large des sanctions, tant pénales qu’administratives, en cas de fraude fiscale ; C’est le « Naming and Shaming ». Concrètement, il s’agit d’appliquer par défaut la peine complémentaire de publication et de diffusion des décisions de condamnation pour fraude fiscale, aujourd’hui prononcées de manière facultative par le juge pénal ;
  • La création d’une sanction administrative complémentaire des sanctions financières existantes, consistant à rendre publics les rappels d’impôts et les sanctions administratives pécuniaires dont ils ont été assortis pour les fraudes les plus graves ;
  • La création d’une sanction administrative, exclusive des sanctions pénales, applicable aux personnes qui concourent, par leurs prestations de services, à l’élaboration de montages frauduleux ou abusifs ; Il s’agit donc de sanctionner aussi les professionnels complices ;
  • L’aggravation de la répression pénale des délits de fraude fiscale en prévoyant que le montant des amendes puisse être porté au double du produit tiré de l’infraction ;
  • L’extension de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) dite de « plaider-coupable » en matière de fraude fiscale pour assurer une réponse pénale plus rapide et plus efficace ;ž
  • Le renforcement des sanctions douanières applicables en cas d’injures, de maltraitance ou encore de troubles à l’exercice des fonctions des agents des douanes, ainsi qu’en cas de refus de communication des documents demandés ;
  • L’extension de la liste française des États et territoires non coopératifs (ETNC) en matière fiscale à la liste de l’Union européenne (UE) ».

Bref, de gré ou de force, les fiscalistes vont devoir se mettre au droit pénal (et nous préférons le gré).

Le juste prix de l’apport d’un actif

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Le Conseil d’État, en Chambres réunies, a rendu une décision le 9 mai courant (n°387071, https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036898095&fastReqId=2054852538&fastPos=1) quant à l’appréciation du prix d’un apport d’actif : attention désormais, à la qualification de libéralité d’une sous-évaluation alléguée dont le différentiel d’avec une « juste évaluation » viendrait rehausser le résultat imposable de la société bénéficiaire de l’apport ….

Mutatis mutandis, le Conseil d’État considère que la valorisation d’un apport doit s’entendre comme celle d’une vente, à savoir d’une valeur vénale rectifiable en cas de sous-évaluation présumée :

 » Sur l’incidence des opérations d’apport sur la détermination du bénéfice imposable :

3. Aux termes du 2 de l’article 38 du code général des impôts :  » Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés (…) « . Aux termes de l’article 38 quinquies de l’annexe III au même code :  » Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d’origine. Cette valeur d’origine s’entend : (…) b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale ; c. Pour les immobilisations apportées à l’entreprise par des tiers, de la valeur d’apport (…) « . Il résulte de ces dispositions combinées que si les opérations d’apport sont, en principe, sans influence sur la détermination du bénéfice imposable, tel n’est toutefois pas le cas lorsque la valeur d’apport des immobilisations, comptabilisée par l’entreprise bénéficiaire de l’apport, a été volontairement minorée par les parties pour dissimuler une libéralité faite par l’apporteur à l’entreprise bénéficiaire. Dans une telle hypothèse, l’administration est fondée à corriger la valeur d’origine des immobilisations apportées à l’entreprise pour y substituer leur valeur vénale, augmentant ainsi l’actif net de l’entreprise dans la mesure de l’apport effectué à titre gratuit.

4. En jugeant, au point 2 de son arrêt, que dans le cas où le prix de l’acquisition d’une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par  » le vendeur ou l’apporteur  » à l’acquéreur, l’administration est fondée à corriger la valeur comptabilisée par l’entreprise pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l’acquisition faite à titre gratuit, la cour a, implicitement mais nécessairement, écarté l’argumentation de la société Cérès tirée, d’une part, de que ce que les dispositions du 2 de l’article 38 du code général des impôts feraient obstacle à la constatation d’une augmentation de l’actif net en cas d’apport et, d’autre part, de ce qu’une opération d’apport rémunérée par l’émission d’actions ne pourrait jamais traduire l’existence d’une libéralité au profit de la société bénéficiaire de l’apport. »

Bref, très certainement une nouvelle mission pour les commissaires aux apports: la responsabilité de ne pas rehausser un résultat imposable (#Touche pas à mon CAC).